La gourme équine

En collaboration avec Catherine Paré, DMV

La gourme est une maladie décrite chez les chevaux depuis le 13ème siècle.

1-CAUSE

La gourme est une maladie très contagieuse causée par une bactérie appelée Streptococcus equi sous-espèce equi. Elle touche principalement et plus sévèrement les jeunes chevaux (moins de 5 ans), mais les chevaux de tous âges peuvent être affectés. Les vieux chevaux (plus de 20 ans) peuvent aussi être plus sévèrement atteints. Le pourcentage de chevaux malades dans une même écurie peut être très élevé (près de 100%) mais la mortalité est faible. Le taux de complication est autour de 20%.

 

2-SYMPTÔMES

Gourme ‘’classique’’

Le cheval commencera à présenter des symptômes (par exemple, de la fièvre) de 2 à 6 jours après le contact avec la bactérie de la gourme; c’est ce qu’on appelle la période d’incubation.

Les symptômes sont :

FIÈVRE : Il est essentiel de prendre une mesure de la température à l’aide d’un thermomètre. Certains chevaux peuvent faire de la fièvre sans le démontrer ou encore d’autres peuvent démontrer des symptômes suggestifs de fièvre mais leur température sera normale. Il est donc essentiel de confirmer par une mesure objective.

ANOREXIE : Le cheval peut arrêter de manger.

ÉCOULEMENT NASAL : Il sera d’abord clair, puis purulent (opaque). Des écoulements purulents au niveau des yeux peuvent aussi survenir.

GROSSISSEMENT DES NŒUDS LYMPHATIQUES : Deux paires de nœuds lymphatiques (communément appelés ganglions) sont principalement atteints :

  • nœuds lymphatiques sous-mandibulaires : situés au niveau de l’auge, c’est-à-dire entre les mandibules (mâchoire inférieure).
  • nœuds lymphatiques rétropharyngés : qui apparaissent dans la région de l’attache de la tête au niveau du cou. Le grossissement de ces derniers peut, dans certains cas, être assez sévère pour nuire à la respiration, d’où le nom de ‘’strangles’’ donné à la gourme en anglais.

Au départ, les nœuds lymphatiques sont durs, puis ramollissent et percent (ou abcèdent) au bout de 7 à 10 jours. Les nœuds lymphatiques rétropharyngés peuvent percer vers l’extérieur ou vers l’intérieur (dans des structures creuses appelées poches gutturales).

La durée totale moyenne de la maladie est d’environ 3 semaines. Suite à la rupture des abcès la majorité des chevaux récupère normalement.

 

Gourme chronique ou compliquée

L’abcédation des nœuds lymphatiques sous-mandibulaires n’est en général pas liée à des complications.
Par contre, l’abcédation des nœuds lymphatiques rétropharyngés est associée à quelques complications potentielles qui sont :

  • Pus accumulé de manière chronique dans les poches gutturales. Le cheval est donc porteur chronique, parfois sans symptôme, ce qui contribue au maintien de la maladie.
  • Pneumonie

 

Gourme métastatique ou bâtarde

La bactérie de la gourme peut envahir d’autres organes ou sites, par exemple, tête (base de l’oreille, autour des yeux), thorax, cerveau, abdomen (rate, foie, reins). Les symptômes dépendent de la localisation des abcès.

 

Complications possibles

  • Purpura hémorragique. Cette complication atteint de 1 à 5 % des chevaux infectés par la bactérie de la gourme. Le purpura hémorragique se manifeste par une enflure importante au niveau de la tête, du ventre et des quatre membres, et ce, environ 2 à 3 semaines après la forme ‘’classique’’ de la gourme. Cette complication peut aussi survenir suite à une vaccination contre la gourme chez des chevaux ayant déjà été infectés naturellement.
  • Anémie
  • Problèmes musculaires
  • Sinusite

 

3-IMMUNITÉ

Si le cheval n’a pas reçu d’antibiotiques, il développera, suite à la maladie, une immunité pouvant durer jusqu’à 5 ans.

Environ 10% des chevaux ayant été malades vont devenir des porteurs chroniques suite à la guérison.

 

4-DIAGNOSTIC

Présentation clinique, écouvillon nasal, prélèvement de pus et culture, prise de sang.

 

5-TRAITEMENT

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) peuvent diminuer les symptômes et faciliter la récupération.

 

On peut appliquer des compresses chaudes sur les abcès qui sont près du point de rupture pour faciliter l’abcédation. Un drainage chirurgical des abcès est parfois nécessaire. On peut ensuite procéder à une irrigation des plaies avec une solution saline iodée.

 

L’utilisation d’un traitement antibiotique est encore controversée. Il a été rapporté que l’usage d’antibiotiques pourrait favoriser certaines complications, comme la forme métastatique de la gourme. Lorsque les abcès sont bien apparents et développés, l’usage des antibiotiques est contre-indiqué car ils vont retarder la maturation des abcès et les symptômes pourraient réapparaître suite à l’arrêt du traitement. Les chevaux traités aux antibiotiques dans les débuts de la maladie (c’est-à-dire avant l’apparition des abcès) ne développeront pas d’abcès. Toutefois, l’utilisation des antibiotiques pourrait aussi nuire à l’établissement d’une bonne immunité contre la bactérie et ces chevaux resteront plus sensibles à une réinfection. Dans la plupart des cas de gourme simple (non compliquée), il est conséquemment recommandé de laisser la maladie suivre son cours et d’isoler les chevaux atteints pour enrayer la propagation de la maladie (voir section 6-Prévention, Régie). De la même manière, il n’est pas recommandé de traiter aux antibiotiques les chevaux en bonne santé exposé à la gourme.

 

Les antibiotiques seront indiqués dans certains cas, suivant la recommandation de votre vétérinaire.

 

 

6-PRÉVENTION

Régie

La source d’infection de la gourme est le jetage nasal purulent ou le pus provenant d’un abcès. La transmission se fait par contact direct d’un cheval avec un autre ou par contact avec du matériel contaminé.

 

Lors d’une éclosion de gourme dans une écurie, aucun cheval ne doit quitter l’écurie et aucun nouveau cheval ne doit être admis. Les chevaux malades doivent être mis en quarantaine stricte.

 

La température rectale de tous les chevaux doit être contrôlée une fois par jour. Les chevaux présentant de la fièvre doivent être transférés en isolement avec les chevaux infectés. La bactérie de la gourme ne commence à être excrétée qu’un ou 2 jours après le début de la fièvre. La détection des fiévreux et leur isolement avant qu’ils n’excrètent la bactérie, et soient donc ainsi contagieux, est conséquemment la clé pour enrayer la propagation de la maladie.

 

Les chevaux malades doivent être manipulés en dernier pour tout ce qui concerne la régie (alimentation, nettoyage du box, etc.). Il faut porter une attention particulière aux vecteurs physiques de la bactérie, comme les vêtements pouvant être porteurs de sécrétions, les brosses, fourches, soit tout matériel et personnes étant en contact avec les chevaux malades. Tous ces vecteurs ne doivent être utilisés que pour et avec les chevaux infectés. À la fin de l’épisode de gourme, tous les instruments et locaux ayant été en contact avec les chevaux malades devront être désinfectés. L’eau de javel est un désinfectant efficace, mais elle est inactivée en présence de matière organique. Tous les objets et surfaces à désinfecter doivent donc préalablement avoir été bien lavés. Les pâturages contaminés doivent être laissés libres pendant 4 semaines. La bactérie étant détruite par le compostage, la litière contaminée peut être compostée.

 

La durée de la persistance de la bactérie dans l’environnement (c’est-à-dire sa ‘’survie’’ en absence de désinfection) n’est pas connue avec exactitude.

 

Comme les chevaux atteints continuent d’excréter la bactérie pendant 2 à 3 semaines après la fin des symptômes, la sortie d’un cheval de la zone de quarantaine peut se faire de 3 à 4 semaines après la fin des symptômes. De plus, comme certains chevaux demeurent porteurs et excréteurs de la bactérie de façon chronique pour des périodes beaucoup plus longues, il est préférable d’effectuer un test sur un écouvillon nasal afin de s’assurer qu’il ne présente plus un risque de contamination. L’excrétion de la bactérie pouvant être intermittente, il est préférable de faire un écouvillon nasal par semaine pour 3 semaines consécutives pour s’assurer qu’un cheval négatif l’est bel et bien. Si le prélèvement est fait directement dans les poches gutturales, il n’a pas besoin d’être répété, ce test étant plus sensible.

 

Bien que peu ou pas effectuée en pratique pour diverses raisons, la quarantaine reste tout de même la méthode préventive de choix, et ce, pour toutes les maladies contagieuses. En absence d’une éclosion de gourme ou d’une autre maladie contagieuse, tout nouvel arrivant devrait idéalement être isolé pour une période de 3 à 4 semaines avant de l’introduire avec les autres chevaux. Il est aussi possible de tester le nouvel arrivant pour détecter s’il est porteur de gourme ou s’il a été récemment exposé à la bactérie, avant de l’introduire dans un troupeau. Les mêmes considérations quant à l’excrétion intermittente s’appliquent aussi dans ce cas.

Vaccination

Il existe quelques vaccins disponibles sur le marché pour la prévention de la gourme, administrables par injection intramusculaire ou par voie intra-nasale. Ces vaccins sont associés à plus de complications que les autres vaccins disponibles sur le marché pour la prévention d’autres maladies. Ces complications peuvent être : réactions au site d’injection, formation d’abcès, purpura hémorragique.

Il est recommandé de ne pas vacciner un cheval ayant été atteint de la gourme pour 1 à 2 ans après l’épisode de gourme, ou même au-delà, à cause des risques de complications (purpura hémorragique).